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Des amis, j’en ai pas. Comme tout le monde. Pourtant j’aime les gens, surtout quand ils sont loin et qu’ils n’ont pas besoin de moi. Ou envie. Parce que les amis, souvent, ça fait croire que ça vous aime bien, qu’on est juste copain, et dés que le vôtre a tourné la tête ils tentent de vous sauter dessus. Pourtant vous lui aviez tout raconté. Votre vie, vos amours, et celui qui hante vos pensées jour après jour.
Des amis ça ne vous invite pas toujours aux fêtes, parce que vous dansez mieux qu’il ne le faudrait et qu’on pourrait vous remarquer à leur place, que vous avez le contact facile et que vous pourriez bien leur prendre leurs amis, surtout quand vous arrivez à les faire rire. On ne sait pas pourquoi, c’est comme ça, mais souvent l’hilarité d’un ami provoque chez l’autre ami la consternation. Lorsqu’il rit avec vous c’est quand vous faîtes de l’autodérision ou que vous vous moquez ensemble de vos autres amis.
Des amis, ça se sert dans vos placards quand vous ne pouvez plus rentrer dans vos vêtements. Ça vous fait des compliments quand vous êtes au pire de vous-même pour vous remonter le moral et vous faire comprendre que vous n’êtes plus qu’une ruine totale. Et ça vous passe leurs devoirs mais pas dans toutes les matières, il ne faut pas exagérer non plus.
Les amis ça n’oublie pas de téléphoner pour prendre des nouvelles des autres, savoir où ça en est entre certains de vos amis et ce que vous pensez de la situation. ça demande conseil et éclairage et ça dit partout que vous divaguez, c’est en général d’accord avec vous, ça répète tout après, souvent déformé.
Des amis ça sert à faire bien sur les profils des blogs, pour faire croire que vous êtes appréciés et ça vous envahit de pub pour des machins dont vous vous foutez. Ça répond à vos commentaires quand ils ne sont pas trop bien parce que votre visage s’affiche et que ça pourrait leur porter préjudice quand ils sont mauvais mais moins que quand ils sont trop bons.
Les amis, ils essayent de vous bourrer le crâne à coup de phrases toutes faîtes qu’on colle et qu’on envoie, pour montrer que la chaîne que vous formez avec les autres est indestructible mais n’hésitent pas eux-mêmes à la détruire quand il le faut.
Les amis ça arrivent chez vous en pleine nuit quand ils sont malheureux et quand ils sont heureux ils vous envoient un sms groupé à Noël et pour la bonne année en même temps, en vous souhaitant tout plein de trucs dont ils crèveraient si ça vous arrivait vraiment.
Les amis ça se sert de vous, de vos relations, de votre argent, de votre frigo et ça oublie de vous offrir un resto, ça veut bien déménager mais n’aime pas trop quand c’est vous qui changez d’appartement. En plus ils n’apprécient pas votre partenaire, s’il est trop sympa ça les énerve, s’il est méchant ça les énerve aussi. Bref, c’est jamais content.
Il y a des gens qui sont assez cons pour croire que l’amitié est un sentiment plus fort que l’amour.
Il y a des gens qui sont assez cons pour croire qu’il y a une différence entre une véritable amitié et un amour, sous le prétexte d’avoir le même sexe, ou le même amant, d’avoir des différents, de ne pas se voir tout le temps, de ne pas se raconter des trucs insipides dans les moindres détails, de ne pas se répandre sur ses failles.
Les enfants eux savent faire la différence, ils demandent toujours si on les aime d’amitié ou d’amour, parce que quand on aime d’amour on a le cœur qui bat.
Quand un ami risque sa vie et qu’on a le cœur qui bat. Quand un ami a des ennuis, a une maladie, un enfant perdu, un parent en moins, un énorme chagrin et qu’on a le cœur qui bat.
Quand un ami a réussi un examen important et qu’on est vraiment fier de lui, qu’un ami a rencontré quelqu’un de bien et qu’on est très content pour lui et que ça se voit qu’on est réjoui qu’il soit réjoui et que ça nous fait battre le cœur.
On l’aime d’amour ou d’amitié ?
Pour moi l’amitié n’existe pas, elle est le fruit d’un hasard, d’un moment, d’une situation, d’un contexte. Des amis j’en ai pas, des amours j’en ai pleins, à des degrés différents qui ne se remarquent qu’au nombre et aux heurts des battements de mon cœur.
Muriel Roland Darcourt
Monologue - Lettre - Le vrai sens de l'amitié
